à la défense de Merzouga

Sur le chemin entre Ouarzazate et Agdz, j'ai pris un auto-stoppeur. Il m'a invité à prendre le thé pour me remercier. Le petit coquin s'est avéré être un fournisseur de tapis, transigeant directement avec les artisans habitant la gorge du Draa. Mon type de chance.


 J'ai tout de suite senti que j'allais devoir payer pour avoir rendu un service. Mais bon, il n'était pas insistant, il disait que pour lui l'important etait de me transmettre de la connaissance sur ce que font les artisans de cette région. Appréciant tout de même son respect, je me suis dit que c'était le moment de faire mon devoir de touriste et d'acheter un fameux tapis marocain, Sachant que la chaîne entre moi et l'artisan est plus courte ici qu'à Fès. 

Après avoir acheter le tapis, le vendeur m'a donné ce châle berbère...
c'est alors que j'ai compris que j'avais très mal négocié...

Son cousin, qui s'est joint à nous pour le thé, est un guide pour la palmeraie d'Agdz (que j'ai ensuite visité avec lui) et pour les expéditions en dromadaire dans l'erg Chigaga (erg=complexe de dunes) près de M'Hamid. Lorsque je lui ai dit que je me rendais à Merzouga ce jour-là même, il s'est mis à être désolé pour moi et a sorti une carte. Je savais bien ce qu'il allait me dire mais je l'ai écouté quand même. "regarde l'erg Chebbi de Merzouga, il est tout petit (en comparaison)! L'erg Chigaga de M'Hamid est bien plus grand! On le parcourt en une semaine. C'est loin des touristes. À Merzouga, des hôtels bordent l'erg de tous les cotés!"


Le guide avec trois auto-stoppeuses qui ont décidé de nous accompagner dans la visite de la palmeraie d'Agdz

Eh bien, maintenant que j'ai vécu l'expérience, je réponds: Merzouga, c'est parfait pour moi!
Alors voici: j'ai trouvé gîte à la Maison Merzouga Segaoui, à Hassilabied (village voisin de Merzouga), effectivement tout près des dunes, mais avec une vue superbe  de la terrasse sur le toit sur celles-ci et la palmeraie qui sépare le village des dunes. Plein confort, accueil berbère chaleureux (ils remportent la palme sur ce point de tous mon périple au Maroc), ils jouent de la musique le soir pendant le repas, etc. 

premières visions de l'erg Chebbi
Guesthouse Maison Merzouga Seggaoui
vue du toît
Les hôtes jouent aussi de la musique


Lever du soleil sur Hassilabied et les dunes de Merzouga

Le lendemain, après une journée d'exploration des régions désertiques avoisinantes (très variées) que ces hommes au charisme de stars de cinéma m'avaient organisé, suivi d' un petit tour au Hammam (je vais m'ennuyer de cela!), je suis parti pour ma 'méharée' en fin d'après-midi. 

Voici quelques images de la journée d'exploration autour de l'erg Chebbi:
Lac asséché et site du futur golf de Merzouga. Bonne idée? Les habitants de la région en sont persuadé.
Merzouga
Les dunes se dressent de façon surprenante dans le désert de pierre noire. Autant par le contraste de couleur que par leur hauteur.

Puit près d'un oasis
Famille nomade


Campement nomade. À la merci des éléments.
Vision typique du désert mais frappante lorsqu'on la voit pour 'vrai'!
Les désert de sable blond se mêle au désert de pierres noires ici.
Tracés de 4x4 qui cicatrisent le paysage. Par chance, leur utilisation est restreinte dans la région. Interdit de se promener sur l'erg en véhicule motorisé.
L'aride désert de pierres noires. Un arbre courageux a quand même décidé d'y pousser!
Petite tempête de sable.

Visite d'un oasis. J'y ai rencontré cet âne!....

...Et ces moutons.
Les chameaux restent bien tranquilles malgré le vent qui les assaillent.
Lahsen, le chamelier, et le dromadaire m'attendaient au pied des dunes. J'étais le seul client ce jour là. La raison était que Le ciel était couvert et il ventait de plus en plus fort. Dommage pour les photos, car les dunes sont vraiment photogéniques au soleil, mais je me suis dit que ça rendrait l'expérience plus mémorable encore. 
Bon, maintenant, je dois dire que monter un dromadaire, ça donne des émotions fortes. Particulièrement Lorsqu'il se lève, avec les pattes de derrière d'abord, fait que l'on croit qu'on va culbuter vers l'avant. mais l'adrénaline surgit joyeusement aussi lorsqu'il grimpe une pente ou en descend une, alors on doit vraiment bien se tenir. Impossible de prendre des photos à ce moment. Vous avez une mouche qui vient vous chatouiller le nez alors que le dromadaire descend une dune? On s'en fout! On se tient! Il nous a prit 1h30 pour se rendre au campement; j'avais les jointures des mains ankylosées et un peu mal au derrière, mais j'avais déjà hâte au lendemain pour rembarquer sur la bête. Cela dit, je ne me vois pas en faire pendant une semaine. 1h30, deux jours de suite, c'est bien assez. Un point pour Merzouga. 
Il y a des hôtels qui proposent un trajet plus court dans les dunes, et bien-sur, de là on voit où se termine l'erg (d'où une autre reflexion qu'une amie qui avait été a Merzouga m'avait dit "c'est trop nul Merzouga, super touristique et on voit où le desert finit!) Mais après une heure trente, vous n'avez que des dunes à perte de vue à 360 degrés. C'est ça le but, non? À l'erg Chigaga, il faut faire de la route pendant plus d'une heure à partir de votre hôtel à M'Hamid, ensuite prendre un 4x4 pour se rendre au pied des dunes, bref, ça prend la journée pour être entouré de dunes. Autre point, les dunes de Merzouga atteignent des hauteurs de 150 mètres, parmi les plus hautes au monde, et au milieu de l'étendue plate du désert noir qui l'entoure, elles font figure de montagnes. Bien que plus étendue à M'Hamid, elles n'atteignent pas ces hauteurs. Finalement, le sable de l'erg Chebbi est ambré, ce qui lui fait prendre différentes teintes selon l'heure de la journée, du rose au doré. On dit que le sable Chigaga est plus simplement blanc... Ça doit être beau quand même!...
Il parait que les dunes sont encore plus impressionnantes au clair de lune. J'ignorais cela lorsque j'ai fait ma réservation - j'avais même trouvé parfait de tomber sur une nuit sans lune pour regarder les étoiles. Mais comme je disais, le ciel était couvert, il y a eu une petite tempête de sable pendant la journée et il a même plut quelques minutes (dans le désert, il faut le faire, mon type de chance!). Mais une fois la nuit tombée, Le vent a cessé et c'était la noirceur et le silence absolue. Ce n'était pas Lahsen le guide, homme de très, très peu de mot, qui aurait troublé ce silence. Je suis monté sur une dune à la lumière d'une lampe frontale que ma mère m'avait acheté - et dont j'avais douté de l'utilité alors, mais fort pratique ici, merci Maman! - et me suis assis sur le sable doux comme de la farine dans le noir. Inoubliable! Pas un moustique, pas une mouche à cette heure, pas une once de vent, juste le silence et l'impression de sentir la présence monumentale de la dune impériale toute proche. Quel contraste avec l'animation incessante des villes marocaines!


Lahsen est un homme de très peu de mot. Aussi, lorsqu'il disait 'tié bié', il fallait traduire par ''T'as intérêt à te cramponner de toutes tes forces si tu veux pas décâlisser par terre''.

Ici, le chameau ne voulait pas avancer car le vent avait dressé une crête sur notre chemin. Lahsen a dû l'atténuer.
ce n'est pas flou! il ventait très fort!

L'immense dune que j'appelle 'l'impériale', au pied de laquelle se dresse notre campement... il y a en a un quinzaine comme celle-là dans l'erg Chebbi mais celle-ci est probablement la plus haute  - en ce moment...
Un thé au Sahara
Le campement au coucher du soleil. Le vent était tombé. J'étais le seul client. Silence absolu.
Le lendemain, notre dromadaire était parti déjeuner malgré sa patte de devant attachée sur elle-même.

Retour: Hassilabied droit devant


Le repas conçu par Lahsen dans le désert. Un délicieux tagine de poulet précédé d'une harira (soupe marocaine - oui, il y avait un peu de sable dedans mais ça ajoutait au pittoresque)


Le buzz d'Essaouira... Et celui d'El Jadida


Essaouira - essayez de prendre un photo sans goéland!
Ville du vent, Essaouira vit essentiellement de la pêche et du tourisme. Autrefois avant-poste portugais appelé Mogador (pour un fan de Galactica comme moi, ce nom magique évoque une nova aussi belle que dangereuse, car chargée de mines spatiales), Essaouira est maintenant une destination phare du tourisme marocain. Un must. La médina est entourée de fortifications bien restaurées sur lesquelles une mer déchainée, par des alizés constants et insistants, vient se briser sur ses murs. Dramatique à souhait.


Donc si la médina bordée de rochers subit les colères de l'Atlantique, la plage, protégée par de petites iles coiffées de  ruines, est large et longue de quelques kms, et longe le sud de la ville. Du moment qu'on apprécie le vent, ce grand croissant de sable invitant est un paradis pour les véliplanchistes et des kite-surfers. 
La belle plage d'Essaouira

Essaouira vit malheureusement un autre drame. La médina s'est transformée au cours des dernières années par des investisseurs étrangers qui achètent les plus belles résidences pour les transformer en riads hôteliers, souvent très luxueux pour satisfaire la clientèle de plus en plus exigeante  qui fuit la chaleur, l'effervescence - ou les excès, selon le point de vue - de Marrakech, pas très loin. Si bien que la médina n'appartient plus aux résidents d'Essaouira. Les cafés se multiplient et les boutiques s'orientent vers un commerce touristique, les prix montent, etc. De plus, ces étrangers n'engagent pas les gens d'Essaouira mais plutôt les jeunes polyglottes de Casablanca et d'Agadir ce qui ne fait qu'accroitre le ressentiment des Essaouiris face a cette transformation de leur ville, à laquelle ils assistent impuissants.

Ainsi, à coté des touristes qui sillonnent les ruelles colorées de la médina, on voit des jeunes qui respirent de la colle dans des sacs en plastique, façon la plus économique d'oublier leur condition de chômeur sans avenir, sans doute.

Essaouira, l'ancienne Mogador des Portugais

Essaouira - Port de pêche

J'avais déjà vu ce comportement à El Jadida à mon grand étonnement; voici l’histoire, version longue!

Un après-midi ensoleillé à El Jadida
C'est un après-midi ensoleillé à El Jadida, les gens se baladent paisiblement sur la belle corniche toute neuve, des jeunes jouent au foot sur la plage. Soudain, j'entends un garçon crier, puis, au loin, dans la direction des cris, je perçois une sorte d'agitation. Puis je vois  un jeune homme courir à toute allure, enjamber un trottoir puis une haie de cèdres et emprunter le passage qui mène à la plage. Le garçon qui crie - sans doute au voleur! - le poursuit. Les cris du garçon captent l'attention de la foule, et d'autres se joignent à lui dans la poursuite du voleur au manteau de marque Diesel (mmm?..copie!). Le voleur regrimpe sur la corniche, poursuivit par maintenant une dizaine de justiciers, il fait encore quelques mètres, puis s'arrête et lance au garçon le téléphone cellulaire qu'il lui avait volé. Les poursuivants s'arrêtent et se réjouissent pour le garçon qui a retrouvé son téléphone, et hésitent en se demandant s'ils poursuivaient le voleur. Celui-ci profite du momentum pour disparaitre. Le lendemain, je marche le long des remparts et j’entends une dame parler fort sur un ton qui ressemble pas mal à celui de reproches ou d’insultes. Elle s’adresse à un jeune homme, et c’est lui, le voleur de la veille au manteau diesel. Celui-ci est en train de respirer dans un sac en plastique et rie de ce qu’elle lui dit (je perçois dans les paroles de la dame le mot 'honte' en arabe) tout en continuant son chemin. Ce comportement délinquant en plein jour m’avait étonné dans ce pays où l’image est si importante.

El Jadida
El Jadida
De retour à Essaouira.
Je suis en train de prendre un café en marge de la rue Zerktouni entouré de dames italiennes jouant au backgamon, de touristes français, et de dames britanniques à leur visite annuelle au Maroc. Il y a quelques musiciens gnaoua qui font une brève performance avant de passer le chapeau. Puis, sur le même espace, sur la ‘scène’, entre un homme fin vingtaine qui vient respirer son sac de colle et se promène devant nous, un bon moment, comme pour s’assurer qu’on le voit bien. Il chancèle, fait une grimace, puis s’en va sous le regard médusé des touristes. Je ne sais pas si c’était son message, mais il semblait nous dire que ce n’est pas parce que nous, les touristes, avions envahit sa ville, qu’il avait maintenant un emploi, ou quelque chose à faire de sa vie…

C'est juste après ces musiciens gnaouas qu'a eu lieu la scène..
La Skala d'Essaouira

Les touristes sont donc heureux à Essaouira!
Mouettes au-dessus de la Skala d'Essaouira

El Jadida est deux fois plus populeuse qu'Essaouira. Pourtant on dirait un village en comparaison. Il n'y a pas encore toute cette infrastructure pour accueillir les touristes (bars, restaurants, etc.). Mais ça s'en vient, car avec le grand complexe Mazagan à 15 minutes d'El Jadida, ça va peut-être changer. Ça a déjà commencé...

El Jadida - l'ancienne Mazagan des Portugais.

Le poste de police - El Jadida

Le côté moins riche d'El Jadida

La caserne à El Jadida - une scène d'Othello d'Orson Wells y a été tournée.