Mes expériences avec le taxi au Maroc…
Il m’est arrivé toutes sortes de trucs avec les taxis au Maroc. D’abord, il faut savoir qu’il y a deux sortes de taxis : les petits-taxis qui sont, comme leur nom l’indique, de petites voitures qui vont pratiquement partout et les grands taxis qui suivent des trajets fixes, comme des autobus, et partent lorsqu’ils sont pleins (3 personnes devant, 4 derrière), ce qui n’est jamais longs. Les grands taxis sont populaires car ils ne sont pas chers. Les petits taxis aussi, il faut les partager avec d’autres passagers (c’est comme ça qu’ils peuvent devenir rentables). Le conducteur a un compteur multiple pour calculer la route de chacun des passagers. Il faut parfois faire un détour pour un passager mais d’habitude, les conducteurs n’acceptent que les passagers qui ont un itinéraire conséquent avec le premier passager.
Les taxis bleus de Rabat
Les taxis blancs d'El Jadida
Les taxis dorés-orangés de Marrakesh
À Marrakech, je ne suis jamais tombé sur un taxi qui avait un compteur fonctionnel. Il faut dans ce cas établir le montant d’entrée de jeu. À Rabat, ville policée entre toutes, ils ont tous des compteurs fonctionnels, ce qui illustre bien la différence de mentalité entre ces deux villes très différentes.
À Marrakesh, le lendemain de mon arrivée, mon amie Karyne m’avait donné rendez-vous aux jardins de la Ménara, de l’autre côté de la ville. Elle m’a dit ‘ça ne devrait pas te coûter plus que 15 dirhams’. Lorsque je suis arrivé à la station de taxis, j’ai calculé dans ma tête; ça ne faisait que 2$, je me suis dit que j’avais dû mal comprendre et que le montant devait être 150 dirhams, me disant que j’avais dû diviser tout de suite par 10 (1 euro= 10 dirhams). Alors c’est le prix que j’ai donné fièrement au taxi, prix 10 fois trop élevé, que le conducteur a bien-sûr accepté, et ce fut d’ailleurs l’un des plus sympathiques conducteurs de taxi de tous! Et dire que je lui ai donné un généreux pourboire parce qu’il était si gentil!!
Morale de l’histoire : ils ne sont pas chers, mais ça je ne le savais pas! Surtout que j’avais remarqué que l’essence était le même prix qu’au Canada. Pourquoi les taxis seraient moins chers alors? C’est malheureusement leur salaire qui écope.
Une autre fois, je revenais tard d’une sortie dans la nouvelle ville de Marrakesh. Le conducteur était rase-bol et avait plutôt l’air sévère. Il faisait jouer une musique chantée par un homme, a capella, en arabe bien-sûr, et voulant dire quelque chose après un long moment de silence, je dis ‘l’musika l’zwina, zwina!’ – belle la musique! Il se tourna lentement vers l’insecte qui lui avait adressé la parole et me regarda de ses yeux sévères. ‘Quran’. Puis il me parla en arabe et au bout d’un moment je compris qu’il me demandait si j’étais chrétien. Je dis que oui, estimant qu’il valait mieux dire ça que la vérité, soit que je suis athée. À ma réponse, il eût une expression indéchiffrable, et je me suis dit que j’étais mieux de lui faire plaisir à celui-là. ‘’Je suis chrétien, mais la religion musulmane me plaît bien, je suis ici pour en apprendre davantage’’. Je me suis dit qu’il n’égorgerait tout de même pas un futur converti! Arrivé à destination, il me dit le prix, 40 dirhams, un peu cher mais je ne contesta pas, puis je sorti le seul billet que j’avais, un 100 dirhams. Il me fît une moue, puis me dit qu’il n’avait pas de change (il y a un manque réel de petites coupures dans ce pays). Ne voulant que partir, je lui dis, ‘gardez tout, ça va Choukran! Beslama!’. Je m’éloignai à grand pas, puis il m’interpella. Je me retournai, puis il me tendit un CD par sa fenêtre que je devinai être celui du Coran, ‘’pour pardonner moi pas de monnaie!’’. Morale de l’histoire, ce n’est pas parce qu’il avait l’air méchant qu’il l’était!
Les taxis bleus-poudre de Meknès
Les taxis rouges de Fès
À Dakhla, j’avais réservé à l’Hôtel Sahara Regency, qui est un hôtel très bien, construit dans les années ‘90 mais à la mode des années ‘80, et situé au cœur de cette petite ville, toute rénovée mais loin de tout, dans le Sahara Marocain, 1000 km au sud d’Agadir, 500 km au nord de la Mauritanie. J’avais un problème : je ne m’y sentais pas bien. D’abord, il y avait tous ces soldats de l’ONU, ce qui donnait une ambiance moyennement cool, (le Sahara marocain est un territoire litigieux depuis des années). Ensuite, le site web laissait croire que l’hôtel avait un accès à la plage, ce qui n’était pas le cas en vérité! Le premier soir, je m’approchai de la rive pour voir comment je pourrais bien y accéder (plage publique? Autre hôtel?), lorsque j’aperçu une plage entre deux quais, un garde s’approcha de moi et me demanda ‘Civil ou militaire’, - ‘touriste’ répondis-je. Il me fit signe d’aller marcher ailleurs. Ça voulait donc dire que je ne pourrais pas accéder à la mer cette semaine? Autre raison pour laquelle mon choix s’était arrêté sur cet hôtel était le choix alléchant des excursions : ‘visite à la dune Blanche’, ‘pêche à l’huître’, ‘baignades plage déserte’. Lorsque je désirai m’inscrire à l’une d’elles, on m’expliqua que l’on devait être minimum 5 personnes. Je doutai que les soldats de l’ONU veuillent m’accompagner à la pêche aux huitres, et la réceptionniste aussi je crois. Pour finir, Dakhla, qui ne ressemblait pas autant au bout du monde autant que je ne l’avais espéré, me faisait surtout penser à Rimouski, et alors que j’aime beaucoup cette dernière, ce n’est pas ce dont j’avais envie. Rimouski en août avec le même vent frais de la mer, le même soleil, la température de 20 degrés, frais à l’ombre et le soir, une ligne montagneuse au loin – ici ce n’est pas un fleuve mais une baie, et la mer que l’on peut voir mais qui est en gros inaccessible. Un Rimouski où il n’y a rien à faire de surcroît. Dakhla est une ‘petite ville’ mais a tout de même plus de 40 000 habitants et est assez étendue. Il aurait fallu marcher 10 km pour avoir accès à une plage, probablement surveillée par des soldats… Le bout du monde que je m’imaginais, et que le site visitmorocco.com laisse miroiter, était plus près de la nature que ça.
Le lendemain matin, après m’être assuré que je pouvais quitter cet hôtel, je réservai au camp de kite-surf Dakhla-attitude. Là-bas, au moins j’allais pouvoir être au bord de l’eau, et peut-être faire du kite-surf. Situé au fond de la baie à 28 km de Dakhla, la dame des réservations de cet endroit m’offrit de venir me chercher. Je déclarai que je pouvais faire le plus gros du chemin en taxi. Elle me répondit : ‘D’accord, rendez-vous au KM 24, là où il y a les caravanes, et de là appelez moi et nous irons vous cherchez’. Sur le trottoir du boulevard principal de Dakhla avec ma grosse valise, j’entrepris de héler un taxi. Le premier qui s’arrêta se rebiffa lorsque je lui mentionna ‘km 24’, il me dit : ‘l’bouliss!’’. Police? Le second me répondit la même chose mais je compris que je ne devais pas prendre un ‘petit taxi’, mais un ‘grand taxi’. Au 3e petit taxi qui s’arrêta, je lui demandai de me mener à la station des grands-taxis, car je voulais aller au ‘km 24’. Il me demanda où je voulais aller en arabe, et je lui répondu un mot sur trois en arabe que je devais aller au km 24, et que de là un chauffeur viendrait me chercher. Il me parla longuement en arabe et semblait positif et surtout me disait clairement de laisser faire les grands taxis… Cool!! En voici un qui n’a pas peur de la police!! Une fois en route, environ 8-10 km plus loin, bien sortis de la ville, il y avait effectivement un petit contrôle policier. Allait-il me débarquer ici? Mais non, le policier nous fit signe de passer. Super. Deux kms plus loin, le taxi s’arrêta. Je lui demandai ‘ici le km 24?’. Et je pus saisir ces mots : ‘’La, la, l’bouliss,.. grand taxi iyyeh, la, la petit-taxi ‘ et je compris qu’il ne pouvait pas aller plus loin et que j’aurais donc dû prendre un grand-taxi. Mais pourquoi ici? Et pourquoi pouvait-il dépasser le poste de police de deux kilomètres? Pourquoi ne pas faire les 10-12 km qui restent? Et sans savoir pourquoi, je payai et débarquai en lui disant merci. J’étais donc sur une route dans le désert avec un soleil de plomb. J’ai appelé la dame de Dakhla-attitude lui expliquant que le taxi m’avait laissé le plus loin qu’il pouvait et que ce n’était pas loin (ouin! Disons) du poste de police. ‘Très bien, restez au poste de police, ne bougez pas, un chauffeur qui fait des commissions en ville passera vous prendre. J’ai roulé ma grosse valise sur les deux km qui me séparaient du poste de police. Il n’y avait pas vraiment d’abri contre le soleil au zénith (on est sous le tropique du cancer et s’était trois jours avant l’équinoxe, le soleil était vraiment au zénith!).
Et j’ai attendu une bonne heure comme ça à regardez les camions de ravitaillements allant à la ville, les convois de l’ONU en sortir, un monsieur berbère, peau parcheminée, yeux bleus, sur son âne qui m’a dit un beau Salam aylekum, et trois hommes dans une très vieille Rolls Royce qui se sont arrêtés pour me demander si je voulais me rendre en Mauritanie. Avec leurs dents en or, leurs turbans, les tatous sur leurs visages bronzés et leur air tout droit sorti d’un film d’aventure, j’ai failli dire oui pour entendre les histoires qu’ils devaient avoir à raconter. Ils ressemblaient ce à quoi des hommes qui ont vécus beaucoup d’aventures doivent ressembler. Moral de l’histoire : débarquer d’un taxi à un endroit imprévu peut vous faire voir des choses que vous ne pensiez jamais voir.
À Fès, en rentrant, je m’apprêtait à mettre ma ceinture, simple réflex, lorsque le conducteur me dit ‘’Non, non, non! Pas besoin. On est en ville ici. On ne dépasse pas 60 km! Pas besoin de ceinture!’’. Connaissant comment tous les taxis conduisent, je l’aurais bien mise!!
Génial, ton texte! Les chauffeurs de taxi du Maroc semblent aussi intéressants que ceux au Québec... Pis ils sont tellement cutes, les p'tits taxis de toutes sortes de couleurs!..
RépondreSupprimerMerci pour votre blog plein de sensibilité à l'égard de mon pays d'origine!
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